J’étais de retour au pays où je m’étais fait un très bon ami… Un ami avec un grand A. Parce qu’il n’avait eu aucune envie que je revienne à Paris, il avait tenté de jouer de ses contacts afin de me trouver du travail. C’est très naturellement que je l’ai contacté dès que mon pied a touché de nouveau le sol de Bamako.
Il m’avait dit, je vais te faire découvrir la ville, je l’ai suivi à un concert sur les hauteurs… On a discuté, discuté… La nuit tombait et Bamako n’étant pas une ville où tu marches dehors, il m’a proposé de venir chez lui. Gentiment, je pensais…
 
Je vais faire court, je suis arrivée chez lui, il m’a demandé comment allaient les amours et m’a répondu sur comment allaient les siens (mal, sa copine venait de France elle faisait trop la go, il avait un mini goumin) ça aurait dû être un bureau des plaintes mais il a choisi précisément ce moment pour me faire des avances.
Il avait envie parce que j’avais l’air de pouvoir le contenter, c’est ce qu’il a dit je minore mes mots (c’était dit bien plus vulgairement) et d’un coup je me suis sentie comme une proie. Ni Uber ni Ueetch ici, ni une pote à qui j’ai envoyé la localisation comme je fais à Paris, un forfait internet mais pas de quoi envoyer un message. Je m’imagine m’enfuir, je le regarde, il est plus grand, plus musclé. Si je cours, je dois trouver le goudron da (la route principale, où les voitures passent) rentrer chez moi, 30 minutes en voiture. Mes sens sont en alerte je regarde ce qu’il y a dans la pièce aujourd’hui c’est ma vie ou la sienne, il m’explique que ce moment là, il l’avait prévu depuis : plus d’un an auparavant parce que j’ai fait un malaise à un événement où il était aussi, et il m’a vue rentrer dans l’ascenseur « j’ai hésité avant de rentrer » me dira-t-il. L’autre, le jour où il m’a présenté à son contact, des mois plus tard. Il m’avait proposé de venir chez lui, mais j’avais des bagages à faire et ainsi j’ai évité le guet apens.
 
Il suppliait, se faisait pressant, menaçant, et on tournait dans la pièce, il s’approchait et je m’éloignais et brusquement il tentait de m’attirer à lui, et je bondissais et j’étais partagée entre est-ce que je crie ? Et si je l’énerve ? Et s’il me frappe ? Qui va retrouver mon corps si loin de chez moi ?
Il a dit, « C‘est parce que tu es française que je suis comme ça, si tu étais malienne, on coucherait déjà ensemble. J’ai jamais violé personne, mais j’en ai forcé.« 
Après des minutes interminables, il m’a regardé et m’a demandé si j’avais peur de lui. J’ai répondu non et il m’a dit « Si, je le vois dans tes yeux… Viens, je te redépose« 
Il l’a fait.
et j’ai réfléchi, réfléchi…
Je me suis beaucoup remise en question… qu’est ce qui fait qu’il s’est dit que c’était possible quelque part, est-ce que je ne l’avais pas cherché ?
Jusqu’à ce qu’on me dise que je ne pouvais pas m’en vouloir et que lui même me supplie de ne pas gâcher sa vie. Avant de me parler de ses copines qu’il avait – « Pourquoi je forcerais avec toi ? Il y a plus jolie que toi. » Puis de me dire qu’il me testait et que si j’avais dit oui il aurait été choqué.
C’était en 2018.
 
Une personne m’a dit que je devrais le dénoncer autrement je serais responsable par procuration de ses potentielles futures victimes. C’est la première fois que j’en parle publiquement et je vais mourir avec son nom, je pense.
Il s’est marié à une personne qui m’a tout l’air d’être consentante et heureuse de son choix.
On m’a dit à ce sujet, les hommes pensent que forcer c’est bien, parce que parfois les femmes refusent en attendant que le gars insiste.
 
Appelez ça un plaidoyer pour le consentement.
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Majoïsme
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