Comme le sexe, l’amour est à propos de donner et prendre, mais quand on parle d’amour, c’est l’inverse de la dynamique du sexe : la femme insiste et parce que l’homme a vu en elle Une Femme Bien (oui parce qu’ils peuvent totalement être intimes avec des femmes qu’ils n’estiment pas), il finit par céder.
La femme reste complètement soumise à la décision de l’homme et d’ailleurs une de mes plus grosses peurs étant petite, c’était de donner ma virginité à un homme qui partirait en courant, avec ma virginité sous le bras, pour vous dire combien je ne pensais pas à prendre –
C’est très ironique qu’il soit considéré que seul l’homme soit apte à vouloir uniquement que du sexe et que la femme soit seulement capable d’aimer – seulement aimer, rien à côté quand l’un est littéralement l’expression corporelle de l’autre, mais ça n’aide pas nos rapports du tout.
Sur le champ de guerre qu’est l’amour, les hommes et les femmes ne combattent pas avec les mêmes armes. Souvent, les hommes sont tous puissants. Entre copines on discute de « perdre son temps », d’importance du statut – de respect lié au statut d’ailleurs. Qu’une femme soit un plan cul ne dit jamais rien de bon d’elle. Qu’un homme crie sur les toits avoir une katula soif (laissez les Congolais vous traduire ce que ça dit) ne dit rien de lui – mais ça dit quelque chose de cette femme. Personne ne songe qu’il faut être un personnage très irrespectueux pour être si intime avec une femme qu’on méprise autant. Je n’ai jamais eu de telles conversations avec un homme sauf avec la minorité qui gagne bien sa vie, puisque perdre son temps pour eux signifie qu’ils perdent de l’argent, avec une femme qui ne convoite que ça, d’ailleurs.
La plupart des femmes rivalisent en idées pour plaire aux hommes. Physiquement, intellectuellement, le plus dur étant de n’être ni trop l’un ni trop l’autre. Parce qu’une femme trop intelligente est « hautaine » et qu’une femme trop belle est vue comme creuse. Et les rapports au lit sont encore très hypocrites la plupart du temps entre un homme qui veut être satisfait mais qui a du mal à s’avouer qu’une femme qui le satisfait en a sûrement satisfait d’autres avant lui et une femme qui jongle entre l’innocence que les premiers rapports devraient avoir (parce que les hommes ont une sorte de fantasme de la femme vierge, pas dans les faits, mais plus dans la mentalité qu’une femme devrait adopter) et l’injonction, une fois le 1er rapport passé, d’être la reine du sexe, c’est ce qu’ils appellent « prude en public, p— en privé » et si c’est le pire qualificatif à donner à une femme, le mot en p dit beaucoup de choses des rapports avec l’homme qui vous le dit.
J’ai fini par apprendre qu’il y avait deux principales options. Soit c’est affectif et vous êtes en plein milieu d’un Bercy (*on parle de baise ici), soit c’est rempli de haine et les concerts se font mais cet homme n’a pas sa place. Il est sous la pluie, devant les marches à vous voir faire des huis clos et le fait de le refuser lui et de surcroît en accepter d’autres, plusieurs, c’est vraiment un truc de femme en P pour lui. Si vous aviez eu la politesse de lui dire oui, il aurait eu le respect d’éviter de vous qualifier de la sorte.
Par contre, quand une femme le dit, je suis toujours perplexe. Est-ce qu’elle le dit au sens littéral, c’est à dire a-t-elle payé une prestation ? – et si oui, en est-elle déçue, est-ce un juron de frustration ? Est-ce que c’est un mot qu’on dit à celle qui nous pris notre plaisir ? (le plaisir ici étant un homme) ou est-ce un mot qu’on dit pour éviter de se regarder dans le miroir ? L’expérience des femmes en P commence toujours au-delà de la nôtre : elle a connu plus de garçons, a eu plus de relations sexuelles et contrairement à nous, elle a fait ce truc qu’une femme bien ne peut pas faire.
Les femmes en P prennent. Elles prennent tout. Elles disent non, elles disent oui. Car il y a bien des gens que ces femmes rejettent. J’ai remarqué qu’hommes et femmes n’étaient jamais d’accord sur qui étaient ces femmes en P. Petites, nous savions qu’une fille de notre quartier en avait les comportements… mais c’est la jeune fille qui s’est permise une seule fois qui a récupéré la réputation. Quand un homme le dit, c’est un souci de possession, quand une femme s’y met, c’est une question de miroir. Il en faut des P, pour qu’on ait des femmes bien non ?
J’ai donc décidé de considérer qu’il n’y avait aucune femme en P – puisque de la même manière où « niafou » peut qualifier n’importe quelle femme noire du moment où elle est noire, P, c’est un mot pour la femme, n’importe laquelle – et quand elle se fait payer, quand c’est une source de revenu pour elle, c’est une prostituée, pas une P.
Appelez ça un plaidoyer pour le consentement,